Conseil interministériel de sécurité routière le 2 octobre : contrôle technique moto annoncé ?
Le ministre de l’Intérieur a annoncé, le 8 septembre, la tenue d’un Conseil interministériel de sécurité routière le 2 octobre 2015. Avec à la clé pour les motards, des obligations de visite technique et de port des gants. On vous explique les enjeux.
Le ministre de l’Intérieur a expliqué, le 8 septembre sur France 2, qu’un conseil interministériel de sécurité routière (CISR) se déroulerait le 2 octobre 2015. Bernard Cazeneuve entend répondre à la hausse des statistiques d’accidents de la route en France durant l’été 2015. Il est fort probable qu’il annonce des mesures visant les motos et scooters : une nouvelle forme de contrôle technique 2-roues et l’obligation du port des gants sont en réflexion à la Sécurité routière. Explications.
Fermeté
Les chiffres de la Sécurité routière au mois d’août indiquent que « la tendance n’est pas bonne », a déclaré mardi Bernard Cazeneuve sur France 2. Le ministre évoque une météo très clémente, qui a incité les Français à prendre la route en nombre. Mais il y a autre chose :« Nous avons, pour une partie des Français, un relâchement des comportements », a ajouté le ministre, qui compte y répondre par la « fermeté ».
Ce discours axé sur la fermeté est nouveau chez Bernard Cazeneuve, qui jusqu’à présent sur le thème de la sécurité routière, avait privilégié la concertation. Mais, sous la pression des associations de lutte contre « l’insécurité routière » (Ligue contre la violence routière, Professeur Claude Got…), le ministre de l’Intérieur n’aura pas d’autre choix que d’annoncer des mesures répressives. Lesquelles ?
Les motards en ligne de mire
Déjà, en juillet 2015, la Sécurité routière avait enregistré 58 morts de plus par rapport à juillet 2014 (+19,2 %). Les motards avaient payé une addition salée, avec 105 morts, soit une hausse de 57 % par rapport au mois de juillet 2015.
C’est ce qui nous fait dire que les conducteurs de motos et scooters, la fameuse catégorie des deux-roues motorisés (2RM), seront impactés par la fermeté annoncée par le ministre. Par quelles mesures ?
Visite technique obligatoire
La première, selon nos informations, risque d’être l’instauration d’une visite technique obligatoire au moment de la vente d’un véhicule d’occasion. Même si les modalités techniques sont inconnues (véhicules concernés, éléments de sécurité inspectés…), il s’agit d’un premier pas vers le contrôle technique 2-roues.
Aucune étude n’a réellement prouvé l’impact de la mécanique sur l’accidentologie moto. Mais le délégué interministériel à la Sécurité routière, Emmanuel Barbe, y voit là une mesure d’équité par rapport aux automobilistes. Le problème pour les motards, c’est que les professionnels de la moto n’y sont pas forcément réticents. Car le délégué voudrait pouvoir faire réaliser cette visite technique dans les ateliers des concessions moto, qui n’en demandaient pas tant pour accroître leur chiffre d’affaires.
À ce stade, un dossier vient s’intercaler, qui contribue à asseoir l’idée que cette visite technique obligatoire deviendrait indispensable (chez nos décideurs, s’entend, pas chez les motards !) : la fin des « 100 chevaux ».
Fin des 100 chevaux
Une directive européenne impose à la France de mettre fin au bridage des motos à 100 chevaux à partir du 1er janvier 2016. Problème avec cette directive, les fonctionnaires français en font une lecture différente de celle de la Chambre des importateurs de moto dans l’Hexagone (la CSIAM) : tout le monde est d’accord pour dire que les motos répondant à la norme Euro 4 seront vendues en puissance libre en France à partir du 1/1/16.
En revanche, c’est différent pour les motos répondant aux normes antérieures (Euro 3…) qui sont encore vendues en concessions, et représentent 90 % du marché des véhicules supérieurs à 100 chevaux. Selon la CSIAM, qui a fait décortiquer la directive par ses juristes, elles peuvent être débridées sans autre intervention de l’État français.
Mais l’administration de notre pays répond que ce n’est pas si simple : c’est à l’État français de décider si ces motos peuvent être débridées ou non. Dans le doute, la CSIAM conseille à ses adhérents, les importateurs de moto, d’attendre une réponse officielle du gouvernement. Qui ne vient toujours pas, alors que les professionnels ne cessent de l’interroger depuis des mois. Et que l’on est à moins de quatre mois de l’échéance… Pourquoi ?
Sujet sensible
« C’est un sujet très politique », intervient Nathanaël Gagnaire, secrétaire général de la FFMC.« Le gouvernement français a peur que la fin de l’exception française des 100 chevaux soit assimilée au fait qu’il lâche les chevaux sur la route ». Nos ministres ont peur d’être accusés de laxisme du côté de la sécurité routière, au moment même où les statistiques d’accidents ne sont pas bonnes. D’où l’idée d’annoncer une contrepartie au débridage, cette fameuse visite technique obligatoire, prouvant ainsi à la société civile qu’on se préoccupe de la sécurité des motards.
Obligation du port des gants dans le train de mesures
Et tant qu’on y est, dans la même logique, d’instaurer l’obligation du port des gants à moto et scooter (conducteur et passager). Obligation qui pourra être étendue, dans les années qui viennent une fois que l’habitude sera prise, à d’autres équipements tels les bottes, le blouson…
Tractations autour des motards
Voilà pourquoi le CISR du 2 octobre 2015 risque d’être crucial pour les motards. Auparavant, les représentants de la CSIAM auront rencontré une nouvelle fois le délégué à la Sécurité routière du gouvernement, le 10 septembre.
Côté motards, la FFMC s’est prononcée contre ces deux mesures et se montre ferme sur le sujet : cela n’aura pas d’impact sur la sécurité des conducteurs à deux-roues. Que pèsent les motards face à des enjeux politiques et économiques qui les dépassent ? C’est toute la question, qui devrait être débattue dans les bureaux du ministère de l’Intérieur, avant le 2 octobre.